The Formidables : fierté et préjugés

Ce qu’il y a de marrant avec la nostalgie c’est la disproportion émotionnelle. Tu prends la photo d’une couche sale et une maman va pleurer pendant 8 heures ! Ou alors tu rappelles à un gars l’anecdote qui concerne la fois où il s’est broyé une bourse en faisait du cheval d’arçons et il en rigole comme une baleine bourrée à la bière. Je suis sûr qu’on pourrait trouver des gens pour se bidonner à propos de leur dernière coloscopie au cours de laquelle ils se sont réveillés avant la fin de l’anesthésie !

Il parait qu’il y a même des gens pour être nostalgique des années 50 et 60. Heureusement, « The Formidables » Remets les choses en place.

Le récit a lieu dans la ville de Arrow City en 1959, c’est-à-dire à une époque où le puritanisme est la norme et ou le racisme est institutionnalisé. C’est dans ce paysage que vont évoluer The Formidables, une équipe de cinq Super Héros qui se cache depuis un an alors que l’histoire commence. Ils vont être contraints de se dévoiler lorsqu’un Super vilain portant les couleurs de « la suprématie blanche » attaque la ville.

La symbolique que développe Chris Malgrain est à plusieurs niveaux. En effet nos héros se cachent pour se protéger du gouvernement mais aussi de cette société ou l’obscurantisme à encore sa place et même représente la majorité. Qu’on ne se trompe pas, nous avons ici affaire  à un récit engagé mais de façon suffisamment intelligente pour ne pas nuire à l’intrigue et l’aventure qui reste trépidante.

On y retrouve la recette des belles équipes que créèrent en leur temps Jack Kirby et Stan Lee mais la naïveté en moins. Les membres de ce groupe sont tous représentatifs des ségrégations de leur époque mais celui qui n’y verra pas un parallèle avec les préjugés qui règnent encore au 21eme siècle et bien celui-là est bien aveugle. La force donc instillé dans ce livre vient du fait qu’il a quelque chose à dire en plus de nous divertir. Non il ne ressemble pas aux productions actuelles qui se contentent de nous proposer la méthode blockbuster-gros-pouvoir-cosmique-qui-défonce-l’univers-avec-explosion-a-la-michael-bay mais c’est bien davantage une histoire intimiste et qui parle à chacun d’entre nous face à la violence de l’intolérance et de la haine.

Monsieur Chris Malgrain qui se charge à la fois de l’écriture et du dessin n’est pas un néophyte loin de là. L’homme a à son actif des collaborations prestigieuses avec Sémic et Scarce. On lui doit aussi la série« Les apatrides » parue chez Pif Gadget. Mieux encore, frenchie a travaillé avec LE grand Stan Lee pour lequel il a dessiné la série Stan Lee’s Alexa qui reçut un accueil chaleureux aux états unis et est sortie en 2013 chez Organic comix en France.

Le travail rendu par ce petit génie du comic Français est des plus respectables au niveau du scénario mais aussi au niveau du dessin où on voit transparaitre les influences chères à l’auteur. Le trait est très « Byrnien » et on entraperçoit l’inspiration du grand Jack Kirby dans le design des personnages. Attention il y a graphiquement une vraie identité, une vraie patte qui accorde le confort de la familiarité mais impose malgré tout son style.

Ce premier volume de « The Formidable : Fierté et préjugés » est disponible depuis l’année dernière chez oniric comics et le deuxième tome paraitra début janvier 2016 donc raison de plus pour se jeter sur ce petit bijoux de chez nous !

Comme quoi la nostalgie quand elle est matinée de modernisme c’est que du bon !!